mardi 27 avril 2010

Le cycle de Terremer


En fouillant dans les sites et forums dédiés à la Fantasy, j'avais plusieurs fois croisé le nom de Terremer, un cycle d'Ursula K. Le Guin d'aucuns considèrent comme un classique. Puis, ne le trouvant pas dans les rayons de la bibliothèque, j'avais oublié ce cycle...jusqu'à récemment. En cherchant un peu plus sérieusement, j'ai trouvé, à mon grand étonnement, la série dans le rayon jeunesse. Un peu désappointée, ce cycle prenait décidément un mauvais départ, je décidai tout de même d'y jeter un oeil, après tout, Les Royaumes du nord ou Les Contes de Perrault sont aussi classés en jeunesse. La lecture serait certainement rapide vu la maigreur des 3 premiers tomes (pas de gros pavés pour ce cycle !).

Première surprise, l'écriture n'est pas celle d'un auteur pour la jeunesse, ouf !
Le livre est écrit sur le mode du conte, un conte fantasy qui ne se complet ni dans les longs dialogues ni dans les longues descriptions. Une fois ce paramètre pris en compte, on peut se laisser porter par la beauté du style et le narrateur omniscient qui se permet parfois quelques prolepses ou remarques prophétiques tout en évitant tout jugement. Comme dans le conte, nous sentons d'emblée la portée morale de la quête du héros. La situation initiale est des plus classiques : un jeune garçon fier et ambitieux veut apprendre la magie après avoir été initié par sa tante puis le sorcier Orion. Mais entre le sage mais silencieux Ogion et l'école de magie de Roke, le jeune garçon n'hésite pas. Il va cependant y apprendre à ses dépends les dangers de l'orgueil et de la haine.
En lisant les premières pages de ce roman, on comprend bien vite où Rowling a puisé son inspiration pour Harry Potter. Difficile aujourd'hui de trouver originales les histoires de sorcier, cependant rendons à César ce qui appartient à César, Terremer offrait un monde encore peu exploité dans les années 60/ 70. D'autre part, les ressemblances s'arrêtent là car Terremer est loin d'être un livre pour enfants.
La magie de ce monde a ses propres lois et les sorciers ne sont pas omnipotents. Le Guin a conçu une métaphysique de la magie originale.
La première trilogie suit les aventures du sorcier Ged sur les îles de Terremer bien que le second tome soit davantage centré sur un autre personnage : Tenar, la prêtresse du temple des Innommables (Nameless). Les personnages sont denses et tourmentés, jamais stéréotypés.
Certes, le rythme est assez lent et tel Ogion, l'auteur adopte un style contemplatif mais c'est peut-être justement ce flot mesuré qui fait de ce livre un havre de paix où le lecteur peut méditer sur la vie.



Au fil de ma lecture, je me suis aperçu que le terme "conte" ne convenait pas pour classifier ce récit, il s'agit davantage d'une légende à dimension parfois épique. Ged est un vrai héros de légende dont le destin n'est pas pesé dans la balance des dieux mais dépend de l'Equilibre entre le bien et le mal. Le troisième tome, le plus abouti selon moi, évite la morale simpliste et le manichéisme facile des livres pour enfants et de nombreux livres de Fantasy. Le Guin pose les jalons d'une vraie philosophie sur la vie et la mort, le pouvoir sur soi et le pouvoir sur autrui, philosophie inspirée du taoïsme semble-t-il.
Lire Terremer, c'est retrouver le plaisir régressif d'une histoire contée auprès de l'âtre, une histoire magique et héroïque. Vous n'y trouverez ni la complexité narrative d'un roman, ni d'amours langoureux entre des amants mais un questionnement métaphysique qui parle au coeur et à l'âme.

Je n'ai lu ni les nouvelles écrites avant la trilogie de Ged ni les suites récentes (Tehanu et Le Vent d'ailleurs) ni le recueil de nouvelles datant de 2001.

A noter : Un téléfilm américain en 2 parties : Terremer, la prophétie du sorcier existe et a été diffusé en 2005 sur M6. Il ne respecte pas du tout l'histoire et a été décrié par Ursula Le Guin.
Toutefois, le fils de Miyazaki, Goro Miyazaki a produit un film d'animation Les Contes de Terremer en 2006. Sa version est certainement bien plus digne d'intérêt. Ursula Le Guin semble l'avoir apprécié sans toutefois être d'accord avec les libertés prises.

Note : 7,75/10

Titre : Le Cycle de Terremer (Earthsea)
Tome 1 : Le Sorcier de Terremer (A wizard of Earthsea)
Auteur : Ursula K. Le Guin
Editeur : Robert Laffont (Ailleurs et demain) + Le Livre de Poche SF
Tomes : 12 tomes et nouvelles
5 romans + 2 nouvelles-préquelles (1964) + un recueil de nouvelles Les Contes de Terremer (2001)
ChronologieTitreDate de sortie
1The Word of Unbinding1964
2Le Trouvier2001
3Rosenoire et Diamant2001
4La Règle des noms1964
5Les Os de la terre2001
6Le Sorcier de Terremer1968
7Les Tombeaux d'Atuan1971
8Dans le grand marais1940
9L'Ultime Rivage1972
10Tehanu1990
11Libellule2001
12Le Vent d'ailleurs2001
Genre : Fantasy / légende
Ecriture : Poétique

+ Pas un roman mais un conte/ légende, l'originalité du système de magie, l'écriture, l'interrogation métaphysique.

- L'aspect moral moins subtil dans le 1er tome (tome le plus tourné vers la jeunesse). Une tristesse indéfinie après avoir fermé le dernier volume (mais est-ce vraiment un point négatif ?)


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dimanche 18 avril 2010

Hello peuple de la blogosphère fantasy


Quelle bonne idée de créer une petite communauté fantasy ! Hugin & Munin sont décidément très pro. Je découvre tant de blogs fort enrichissants et de nouvelles idées de lecture.
Je rejoins donc le mouvement (un peu en retard).
Et un nouveau devoir rendu ! ;-) (enfin si ça marche)

Les Portes de la mort


Suite aux conseils et à la chronique de l'excellent blog Imagine...erre d'Arutha, j'ai découvert cette série dont, il est vrai, on entend peu parler.
Longtemps laissés aux placards ( car à consommer avec modération ), les personnages on ne peut plus classique de la Fantasy : elfes, sorciers, nains ont donc à nouveau peuplé mes lectures. Cependant, le mérite de Margaret Weis et Tracy Hickman est de ne pas avoir abusé des emprunts au monde de l'héroic Fantasy. Sans se prendre trop au sérieux, ils jouent avec les codes de ce genre pour nous offrir une histoire originale, dynamique et très agréable à lire.

Il s'agit, malheureusement comme dans toute société, d'une lutte de pouvoir intestine entre deux races aux pouvoirs magiques surhumains. L'une et l'autre font figure de dieux pour les races jugées inférieures : humains, nains et elfes (les menschs). Menacés par les Patryns qui affichent leur volonté de domination, les Sartans décident d'éclater le monde en 7 univers. Les Patryns sont enfermés dans un labyrinthe censé faire office de purgatoire. Les autres races sont réparties entre 4 univers, conçus au préalable pour être interdépendants. Mais les tout-puissants Sartans vont peu à peu péricliter, rien ne va se passer comme prévu et les Patryns vont réussir à sortir de leur prison.
Nous suivons les aventures d'Haplo, un Patryn envoyé par son seigneur visiter les 4 univers à travers la Porte de la mort. Rongés par la haine contre les Sartans, leur but est de les anéantir et d'asservir les autres races. Mais très vite, cette mission va devenir un véritable voyage initiatique pour Haplo. Qui apprend le plus de ce voyage ? Lui ou les menschs ? Qui est le véritable ennemi ? Les Sartans ou la peur, la haine et les préjugés ?

De chaque tome, il émane une tonalité et ambiance particulières
- L'Aile du dragon (sur Arianus) est peut-être le plus classique : machinations politiques, elfes, assassin qui devient héros... beaucoup d'actions et une curiosité qui s'éveille.
- L'Etoile des elfes (sur Pryan) est plus insolite, plus sombre aussi, bien que le personnage de Zifnab amène un côté loufoque. Je ne suis pas fan des références à notre monde (Tolkien, Pern, James Bond...) mais certains peuvent aimer.
- La Mer de feu est sans conteste le plus noir des 7 volumes. Certainement le plus angoissant et le moins agréable à lire.
- Le Serpent mage introduit une nouvelle menace et change la donne.
- La Main du chaos syncrétise tous les personnages et univers précédents. C'est l'heure des choix pour les héros.
- Voyage au fond du labyrinthe est le retour aux origines pour Haplo. Son expérience fait de lui un étranger parmi son propre peuple.
- La Septième porte place Alfred et Haplo face à un dilemne : les Menschs seront-ils toujours la proie des Sartans et des Patryns ?

Certes, Les Portes de la mort n'est pas la révélation tant espérée en Fantasy mais elle sait se distinguer du lot, d'une part par son sujet plutôt surprenant et original, d'autre part par ses personnages attachants (mention spéciale pour Alfred et Haplo). L'action est au rendez-vous et dès le 4e tome, un rebondissement modifie la destinée des personnages et insuffle une nouvelle énergie à l'intrigue. Les auteurs mettent en place une réflexion sur le pouvoir, un peu caricaturale il est vrai, mais intéressante. De toute façon, il ne faut pas y chercher de profondes méditations sur l'univers, c'est avant tout une histoire bien menée et un très bon divertissement.

Note : 7,5/10


Titre : Les Portes de la mort (Death Gate)
Tome 1 : L'Aile du dragon (Dragon wing)
Auteur : Margaret Weis & Tracy Hickman
Editeur : Presse pocket
Tomes : 7 tomes
Genre : Fantasy / univers
Ecriture : Simple

+ Des personnages qui évoluent. De l'action à toutes les pages. Un univers original.

- Zifnab, le personnage farfelu. Parfois un peu "téléphoné".


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vendredi 16 avril 2010

Le Prince du néant (tomes 2 &3)


J'étais très excitée à l'idée de reprendre la lecture de cette trilogie, après un premier tome très prometteur. C'est sans conteste une série de qualité et originale.
J'apprécie l'intelligence de Baker, lorsque nous pourrions lui reprocher quelques longueurs ou voir notre intérêt commencer à s'effriter, il sait toujours nous concocter de palpitants rebondissements adroitement prémédités.
J'apprécie aussi les réflexions profondes des personnages sur eux-mêmes, leur évolution et leur perception de la religion.
Alors oui, Baker prend son temps pour faire avancer la sainte croisade et c'est dur d'attendre la fin du dernier volume pour enfin rencontrer Shimeh et le père de Kellhus... surtout que la fin tant attendue n'est pas réellement au rendez-vous. Clairement, l'auteur avait en tête sa seconde trilogie d'où cette absence de dénouement satisfaisant (quid de l'apocalypse ?) C'est dommage... après 3 volumes d'attente !
Qu'en est-il de l'envoûtement ressenti lors de la lecture du premier tome ? Alors que je commençais enfin à bien cerner les différentes factions, une partie de la magie et du mystère se sont aussi évaporées. Peu à peu, le Consult qui me semblait si terrible et effrayant est apparu vulnérable finalement, tout comme l'incroyable et mystérieux Kellhus, juste humain et donc susceptible de faire des erreurs. Les comparaisons au Christ, bien qu'indirectes, sont très présentes et nous ramène en terrain connu.
Je ne peux donc cacher une petite déception : si j'ai lu ces 2 volumes avec beaucoup de plaisir, je ressens aussi cette amertume au fond de moi, l'impression que Backer aurait pu réaliser un chef-d'oeuvre et frôler la perfection.

(Pour le synopsis général, voir Le Prince du néant (tome 1))

Note : 8/10

Titre : Le Prince du Néant
Tome 2 : Le Guerrier prophète (The Warrior-Prophet)
Tome 3 : Le Chant des sorciers (The Thousandfold Tought)
Auteur : R. Scott Baker
Editeur : Fleuve noir + Pocket
Tomes : Trilogie. 2 tomes parus en France. Bakker a initié une nouvelle trilogie The Second Apocalypse dont les événements prennent place 20 ans après. Le 1er tome américain est sorti.
Genre : Fantasy politique/religieuse
Ecriture : Superbe mais difficile

+ La place de la religion, un monde fascinant aux peuples très différents, l'écriture, les personnages très humains.

- L'aspect philosophique vient retarder l'action. On peut tout à fait trouver cette saga ennuyeuse si l'on recherche des grosses batailles et de l'action à toutes les pages.
L'absence de vraie fin.


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